Brazzaville : les sinistrés du 4 mars toujours dans l’incertitude

Plus de trois semaines après l’explosion d’un dépôt de munitions en plein cœur de Brazzaville, les sinistrés vivent toujours dans des conditions très précaires. Et tout risque de nouvelles explosions n’est pas exclu.

(Syfia Congo Brazzaville)

Dimanche 4 mars, cinq détonations, d’une violence inouïe réveillent en sursaut les Brazzavillois. Tous les systèmes d’information (téléphone, télévision, radio) sont immédiatement coupés. La République du Congo, encore traumatisé par la guerre des années 1990, est plongée dans la peur et les rumeurs de coup d’Etat.

Les 1,37 million d’habitants de la capitale finissent par apprendre qu’un dépôt de munitions, situé en plein cœur de leur ville, a explosé, coûtant officiellement la vie à 282 personnes et en blessant plus de 2300 autres. Mpila, le quartier touché, est à terre, soufflé par l’explosion. Des milliers de sans-abri se réfugient en hâte dans différents centres d’accueil.

Trois semaines après, le calme semble être revenu dans la ville. L’aide nationale et internationale continue de parvenir au ministère des Affaires sociales, mais sa redistribution pose par endroits des problèmes. Les chefs de quartiers, de zones et de blocs recensent actuellement les sinistrés, afin que ceux-ci soient indemnisés. Pour l’heure, le montant que chaque famille éprouvée devrait recevoir n’a pas encore été fixé par le gouvernement, qui se dit soucieux de ne pas prendre de « décisions unilatérales ».

A la cathédrale Sacré Cœur, un des centres d’accueil réputés les mieux organisés, les réfugiés dorment sous des tentes ou à ciel ouvert, sur des matelas posés à même le sol. Des enfants jouent ça et là. Les vêtements sèchent où ils peuvent… Une équipe de gendarmerie a été déployée pour mettre de l’ordre, car certains se faisaient passer pour des sinistrés, afin de recevoir des vivres et des dons.

Jean Ndzinga Basongo, réfugié ici dès le 5 mars témoigne : « Au début, les religieuses géraient et distribuaient les vivres, mais, depuis que c’est le ministère qui s’en charge, il nous arrive de ne pas avoir de nourriture. » Le camp est par ailleurs dépourvu d’installations sanitaires : ni toilettes, ni douches. Les pluies, fréquentes en cette saison, rendent le quotidien plus difficile encore. Les risques d’épidémies, comme le choléra, liées à la saleté sont présents dans tous les esprits.

Précautions et questions

A Mpila, sur le site de l’explosion, près de 8,5 tonnes de munitions et engins explosifs auraient déjà été détruites. Financée par l’Union Européenne (UE), la mission de l’ONG britannique Mines Advisory Group (MAG) estime toutefois que cette dépollution « prendra des mois, peut-être des années ». Elle demande donc à la population de « ne pas rentrer sur le site » et de « ne pas toucher aux munitions ». Le risque d’explosion étant encore, selon elle, « très important ».

Le président Denis Sassou Nguesso a annoncé l’installation à l’avenir de ce type de dépôts à l’extérieur de la ville et la mise en place d’une commission d’enquête. Plusieurs questions restent en effet en suspens. Comment un court-circuit a-t-il pu se produire dans un dépôt de munitions ? Les dépôts d’armes ne sont-ils pas soumis à des normes de sécurité spécifiques ?

Le comportement de la plupart des médias occidentaux pose aussi question… Ainsi, si la communauté internationale, Union africaine en tête, a réagi et rapidement fait preuve de solidarité, les TV, radios et journaux français ont quasiment ignoré cette tragédie, n’y consacrant pour la plupart que de courtes brèves. Les massacres d’éléphants au Cameroun avaient fait, eux, la une du Monde..

Par Marien Nzikou-Massala, Anne Perrin

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