Bas-Congo : La mode est aux gros seins, non sans risques

Pour se sentir belles et attirantes de plus en plus de filles du Bas-Congo veulent avoir de gros seins. Elles ont ainsi recours à des manipulations et à divers produits vantés dans les médias mais dont la composition n’est pas connue, pas plus que les risques sur la santé.

 »J’avais honte de mes petits seins, j’ai enfin réussi mon rêve de les faire grossir », témoigne, heureuse, une habitante de Matadi au sud-ouest de Kinshasa où désormais la norme sociale veut que pour être belle, la femme doit avoir une poitrine plantureuse.  »

C’est attrayant et c’est un signe de féminité que d’avoir une forte poitrine. Et les hommes adorent ça », se justifie-t-elle. Les cabinets cosmétiques qui ont ouvert leurs portes à Matadi ne désemplissent pas.  »Depuis six mois, une dizaine de filles se sont déjà fait grossir les seins chez nous », témoigne un agent de l’un de ces cabinets qui proposent une gamme de produits locaux et importés et de compléments alimentaires aux clientes qui veulent voir leur poitrine prendre du volume. On y trouve des pommades, des tisanes, divers comprimés, des ventouses, etc dont la composition n’est guère connue, de même que leurs effets secondaires possibles

Depuis près de quatre ans, cette tendance est en vogue au Bas-Congo. « A notre époque, avoir une forte poitrine était sujette aux railleries. Des noms étaient collés à celles qui en avaient. Ce qui poussait les filles gênées à dissimuler leurs gros seins sous des vêtements amples, se souvient Carine Makwala, une vieille maman. C’était dur de supporter les regards moqueurs des garçons et des filles. »

Certaines se sont même déformées le torse à force de cacher leurs gros seins et des mamans conduisaient leurs enfants auprès des grands parents pour les « soigner » à l’aide des plantes.  »Comme les mentalités changent !, s’étonne Madeleine Nzuzi, une septuagénaire de Nzanza à Matadi qui était jadis submergée quotidiennement par le nombre de filles qu’elle recevait. Aujourd’hui, je n’en reçois que très rarement. »

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Nafissatou Traoré dit « Nastou »

Sous l’influence des médias, avoir une grosse poitrine est devenu le symbole de la beauté. Très suivie à Matadi, la série télévisée ivoirienne à succès  »Ma famille » y est pour beaucoup.

Elle met en en effet en scène Nafissatou Traoré dit « Nastou », une actrice décomplexée de ses gros seins naturels « un peu hors normes » et qui faisait l’objet de moquerie de la part de ses camarades dans sa tendre enfance.

Elle s’employait alors à les cacher sous de vastes robes. Mais depuis le succès international de ses films, elle n’en a plus honte et les arbore fièrement. Au Bas-Congo,  »Nastou » désigne la tendance à la mode qui consiste à porter des décolletés serrés qui mettent en valeur la poitrine.

Du coup, les filles à faible poitrine se battent bec et ongles pour lui donner de l’envergure.  »Quand vous avez une belle poitrine, les hommes vous dévorent du regard. J’en rêve », lance une journaliste qui utilise les produits pour grossir ses seins.

Pour Charles Bromains Madina, psychologue, celles qui agissent ainsi font partie « d’une catégorie des personnes qui ne s’acceptent pas et qui sont en conflit envers elles-mêmes au niveau de l’inconscient lequel se matérialise ».

Des risques mal évalués

Face à cet engouement, des commerçants, des naturopathes, tradi-praticiens… ont trouvé un marché. Ils magnifient les vertus de leurs produits dans les médias.  »Vous voulez avoir une belle poitrine, venez chez nous », invite une publicité d’un  »Cabinet cosmétologique » dans les medias locaux. Pour un de ses employés  »après consultation, la cliente est soumise au massage puis à une ventouse. Les résultats s’obtiennent entre trois et quatre mois selon l’organisme ». S’y ajoutent la pris de « suppléments alimentaires naturels qui n’ont pas d’effets secondaires sur la santé », prétend-il.

Mais la composition précise de la plupart de ces produits n’est pas mentionnée.  »Tout ce qui a trait aux hormones est dangereux pour la santé. Il faut être prudent. C’est pour cela que ces produits qui font grossir les seins sont interdits dans d’autres pays », prévient Emmanuel Nzuzi, pharmacien inspecteur provincial intérimaire qui promet que l’inspection fera prochainement une descente sur terrain pour analyser ces produits.  »Les femmes sont sensibles au cancer du sein, elles doivent faire attention avec ces produits d’origine et de composition peu sûres ».

Par Alphonse Nekwa Makwala

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