Le civisme des commerçants rwandais sert d’exemple en RD-Congo

De nombreux commerçants rwandais s’installent à Goma, à l’est de la RD Congo où ils sont très appréciés des clients. Pour les mêmes marchandises, ils vendent moins cher que les Congolais et pourtant ils payent taxes et impôts. Leur civisme commence à faire école.

(Syfia Grands Lacs/RD Congo)

Véritable plaque tournante, Goma est depuis un an, le point de chute de nombreux Rwandais, attirés par l’intense activité économique qui règne dans la capitale du nord Kivu, à l’est de la RD Congo. Magasins de produits manufacturés, stations service et pharmacies côtoient les magasins et boutiques tenus par des commerçants locaux. « Avant d’exercer leurs activités, ils viennent d’abord se mettre en ordre en ce qui concerne les droits et taxes dus à l’Etat », affirment les services de la Direction générale des Impôts (DGI).

Un marché congolais

Les prix affichés par les commerçants rwandais défient toute concurrence et attirent les clients enchantés. « Un bidon d’huile de cuisine qui coûte ailleurs 6,5 $, revient ici à 4,5 $, un sac de riz pakistanais 21 $ au lieu de 25 $, une chemise est à 10 $ ici et 15 $ ailleurs. Ces différences des prix se constatent sur de nombreux autres articles », témoigne une ménagère qui habite à Goma.

Organisés et rigoureux, les Rwandais attirent les clients et écoulent rapidement leurs marchandises. « Nous ajoutons une marge bénéficiaire raisonnable. On gagne moins mais on vend vite. Cela nous permet de nous réapprovisionner rapidement », précise un Rwandais, gérant d’un magasin à Goma.

Selon des Congolais qui font la navette entre les deux pays, au Rwanda, l’exercice du commerce est soumis à un certain nombre de règles, notamment en matière de fiscalité et de taxes, que les commerçants sont tenus de respecter. Des agents du service public assurent un contrôle régulier. « Les prix sont fixés par l’Etat, en concertation avec l’Association des commerçants.

Tous les commerces sont tenus d’afficher les prix de vente de leurs produits, fixés selon une nomenclature officielle. Les contrevenants sont punis d’une amende et il n’y a pas de dérogation ni corruption possible », explique Célestin Mutokambali, congolais, professeur à Gisenyi au Rwanda.

La corruption ne paie pas

Les pratiques sont bien différentes de ce côté-ci de la frontière, où peu magasins s’acquittent des obligations fiscales et exercent leur commerce en toute illégalité. « Dans la plupart des magasins gérés par des Congolais, les marchandises ne sont pas étiquetées, et les prix sont à la tête du client », déplore un activiste des droits de l’homme habitant Goma.

Certains commerçants locaux justifient les prix élevés de leurs produits par les tracasseries qu’ils subissent de la part des contrôleurs. « Tous les jours, c’est un défilé incessant d’agents qui nous réclament de l’argent. Nous sommes obligés de leur verser un pourboire pour qu’ils nous laissent tranquilles. Et nous répercutons ces frais sur nos prix de vente », avance un commerçant local.

Un argument qui ne trouve pas d’écho chez les clients qui estiment que les commerçants entretiennent eux-mêmes la corruption, afin de se soustraire à leurs obligations. « Presque toutes les marchandises vendues sur le marché ont la même origine et sont importées suivant les mêmes circuits. Il n’y a donc pas une grosse différence dans les prix de revient qui justifierait l’écart dans les prix de vente », précise un déclarant en douanes.

Un exemple à suivre

Dans le secteur du transport en commun, les Rwandais payent régulièrement l’assurance et d’autres taxes pour leurs véhicules et sont à l’abri des tracasseries de la police routière. « Rares sont les transporteurs locaux qui possèdent tous les documents officiels. Ils préfèrent à chaque passage glisser un billet aux policiers de la route, qui profitent bien de la situation.

Et les nombreux conciliabules entre policiers et chauffeurs engendrent souvent désordre, embarras de la circulation et perte de temps pour tout le monde », confie un chauffeur qui roule pour un transporteur rwandais. « Les agents de la circulation ne m’arrêtent jamais car ils savent que j’ai tous les papiers en ordre. Je ne perds pas de temps à négocier avec les policiers et ma recette journalière s’en porte bien », ajoute-t-il.

Faute d’arguments, des commerçants congolais avaient commencé à dénoncer une concurrence déloyale de la part des Rwandais. « Lors de nos réunions, mes collègues se plaignent toujours de la concurrence déloyale, mais il n’y a rien à dire sur l’attitude de nos homologues rwandais.

C’est plutôt les Congolais qui doivent changer d’attitude et de pratiques pour se conformer à la loi sur l’exercice du commerce », précise le Président de la Fédération des Entreprises du Congo (FEC). Certains ont bien réfléchi à la situation et compris les avantages à se mettre en ordre dans l’exercice de leur travail. Ils s’efforcent de suivre l’exemple de leurs collègues rwandais.

Par Désiré Bigega

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