La désintégration de Philippe Faucon: quand la réalité dépasse la fiction

Desintegration-04 Près de trois ans après sa sortie en France, le film La Désintégration de Philippe Faucon était présenté pour la première fois au Canada en projection spéciale, le 12 février dernier, au cinéma du Parc de Montréal en présence de son réalisateur.

Plus que jamais collé à l’actualité, le troublant film tourné en 2011 (certains l’ont même qualifié de prémonitoire après l’affaire Mohammed Merah), raconte l’histoire d’Ali, Nasser et Hamza, trois jeunes hommes d’une vingtaine d’années vivant dans une cité de Lille, dans le Nord de la France.

Les trois amis vont faire la connaissance de Djamel, un «frère» de dix ans leur aîné. Ce dernier, habile manipulateur, connait mieux que quiconque leurs déceptions et leur révolte face à une société dans laquelle ils sont nés, mais dont ils pensent ne plus faire partie. Djamel va alors les endoctriner, les entraînant peu à peu vers l’islamisme radical et le terrorisme.

Un portrait habile

Desintegration-05Il est impossible de ne pas faire un parallèle entre le film de Philippe Faucon et les événements récents qui se sont produits au Canada, en France et au Danemark.

Ottawa, Saint-Jean-Sur-Richelieu, les attentats de Charlie Hebdo, Copenhague… Tous les tristes événements qui s’y sont produits ont été perpétués au nom de la religion.

Dans son long métrage, Philippe Faucon ne juge pas. Il montre avec une précision quasi chirurgicale comment trois jeunes hommes, qui se sentent perdus et rejetés par leur propre pays, vont glisser vers l’intégrisme religieux, poussés par un aîné qui se veut compréhensif et empathique.

«Grâce à son discours habile, l’endoctrineur connaît mieux que personne ce que ces jeunes peuvent ressentir. Il sait comment récupérer leur détresse, car il sait exactement par où ils sont passés», a indiqué le réalisateur après la projection du film à Montréal.

Desintegration-07-FauconEn s’attaquant à un sujet aussi sensible que le terrorisme, Philippe Faucon ne voulait surtout pas faire quelque chose de simpliste et de caricatural.

«La réalité est complexe et multiforme, a-t-il souligné devant le public montréalais. On ne peut pas la présenter avec des étiquettes trop simples. [Dans le film], on a essayé de décrire sur quoi pouvait s’appuyer un discours de récupération d’un sentiment d’exclusion qui peut exister dans certains quartiers en France.»

Des efforts vains

Le personnage principal, Ali, joué par le remarquable Rashid Debbouze (frère de l’autre), ressent un fort sentiment d’exclusion lorsqu’il n’arrive pas à trouver, malgré tous ses efforts, un stage pour terminer ses études.

Dans une scène particulièrement marquante, le jeune homme pète littéralement un plomb dans sa classe lorsqu’il souligne à son professeur qu’il n’a pas décroché de stage, et ce, malgré plusieurs dizaines de C.V. envoyés. C’est également le cas de plusieurs de ses camarades de classe, Noirs et Maghrébins.

Desintegration-06C’est juste après cette scène qu’Ali bascule de l’autre côté, qu’il abandonne tout pour se consacrer uniquement à sa foi, malgré les recommandations de son grand frère qui lui dit de ne pas baisser les bras.

«Tous les jeunes qui ont cet itinéraire de déception ne vont pas forcément plonger dans le piège de l’intégrisme», a tenu à nuancer le réalisateur.

Le grand frère, qui a réussi à s’intégrer et qui s’est marié avec une Française, vient équilibrer la palette des personnages d’une façon très juste. «Dans mon film, je ne voulais pas montrer seulement ceux qui ne réussissent pas, ceux qui sentent qu’ils ont échoué. Je voulais également démontrer qu’il y en a certains qui s’intègrent», a pondéré le réalisateur.

S’il avait à refaire ce film aujourd’hui, serait-il allé plus loin? À cette question, Philippe Faucon répond de façon franche. «Je pense que je l’aurai fait différemment, a-t-il confié. Nous nous serions basés sur les réalités tragiques qui sont désormais connues de tous.»

1 COMMENTAIRE

  1. Où peut-on voir le film La Désintégration? Va-t-il être programmé dans un cinéma à Montréal? Merci.

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