Ces congolaises qui assument seules la scolarité des enfants

Au congo, bon nombre d’hommes, égoïstes et irresponsables, abandonnent financièrement leurs enfants. C’est le cas notammeny à Djambala dans le département des Plateaux.

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« Si papa s’était occupé de notre scolarité, je ne chômerais pas aujourd’hui ! Je suis allée jusqu’en classe de 1ere. Je suis intelligente de nature ! », explique, avec regret, Joëlle Martine Gabio, 50 ans.

Cette agricultrice, présidente du groupement Jeunesse Onari d’Abala Ndolo, un village à 12 km de Djambala, poursuit : « Dans la famille, nous étions neuf enfants. Aucun d’entre nous n’a réussi…Pourtant, mon père fut un grand chasseur. Il pouvait tuer un gibier lui rapportant 30 000 Fcfa (45 €), mais il ne pensait pas à nous acheter ne serait-ce qu’un cahier. Même si l’enfant ne réussit pas à l’école, il doit savoir au moins lire et écrire ! »

Congo-Brazza-FlickrComme Joëlle Martine, dans le département des Plateaux, bon nombre d’enfants doivent arrêter leur scolarité, abandonnés financièrement par leurs pères géniteurs qui laissent tout à la charge de leurs épouses.

Bernadette Malouri, présidente de la Coopérative chrétienne pour le développement du district de Djambala, rappelle que le mari est le chef de famille et doit, en principe, tout assumer.

Cependant, la réalité est toute autre, selon elle : « La maman souffre pour fabriquer le manioc et fait tout pour scolariser les enfants. Pendant ce temps, papa croise les bras… Tout cela fait partie des violences faites aux femmes ! Ces hommes ont un mauvais cœur. Ils pensent que lorsque leurs enfants réussiront, seules les mamans en bénéficieront. »

« Les enfants, une semence »

Selon Tatiana Mpala, habitante du quartier Ngambao de Djambala, l’une des causes de cette « fuite de responsabilités » des hommes serait due à leur statut de polygame : « Ce sont souvent des hommes qui ont deux foyers qui abandonnent la scolarité de leurs enfants à leurs femmes.»

Germaine Inko, directrice départementale de l’Intégration de la femme au développement dans les Plateaux, condamne pour sa part « les mamans qui ne dénoncent pas leur maris refusant à leurs enfants le droit d’aller à l’école ou ceux qui n’assument pas leur scolarité de peur de perdre leur mariage ». Des hommes souvent sous la domination de leur nouvelle épouse.

De peur de perdre cette dernière, ils préfèrent sacrifier la scolarité des enfants de leur précédente union…

Quelle que soit la configuration familiale, c’est toujours l’enfant qui est pénalisé… Junior, 20 ans, ressortissant de Djambala et élève en classe de terminale, témoigne : « Depuis que je suis à Brazzaville, papa ne s’occupe plus de ma scolarité. Il m’a dit que c’était par manque de moyens financiers. Maman prend donc en plus en charge mes frais pour le centre d’encadrement et les travaux dirigés (travaux pratiques, Ndlr). ».

Camille, étudiant originaire lui aussi de Djambala, est dans la même situation : « Au village, papa et maman assumaient ma scolarité. Depuis que je suis ici à Brazzaville, papa ne répond plus à ses obligations. Il a laissé toute la charge à maman qui ne fait que les travaux champêtres. Elle m’envoie le peu qu’elle trouve et je me débrouille avec…»

Certains papas restent cependant exemplaires. « Je travaille et ma femme est ménagère. Je m’occupe donc de la scolarité de mes enfants. Je ne suis pas le seul ! Nous sommes nombreux à agir ainsi. Ces papas qui négligent les études de leurs enfants sont parfois les vieux dans les villages. D’autres négligent la scolarité, car ils sont pauvres ou ne connaissent pas l’importance de l’école », tente de justifier Jean Pierre Mountali.

Ce chef de quartier Ngambao à Djambala en est persuadé : « Les enfants sont comme une semence. Nous semons aujourd’hui pour récolter demain. Donc, le conseil que je peux donner à ces pères est de changer de comportement pour s’occuper de la scolarité de leurs enfants ».

Un avis proche de celui de Bernadette Malouri : « Les enfants sont la retraite des parents. Si cette retraite n’est pas bien préparée, nos jeunes deviendront des délinquants. »

Par Hortense Nathalie Ngatsongo

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