« Moi capitaine » de Matteo Garronequi: voyage au bout du monde pour deux migrants

Coup de cœur du Mois de l’Histoire des Noirs, le long métrage Moi Capitaine du cinéaste Matteo Garronequi raconte la triste épopée de deux jeunes Sénégalais de 16 ans qui veulent tellement se rendre en Europe qu’ils oublient tous les risques et les cadavres qu’ils doivent traverser peut-être y arriver.

C’est l’histoire du jeune Seydou 16 ans qui habite avec sa mère et ses sœurs. Entre l’école, le foot et l’étal de sa mère, il trouve le moyen de faire des petits boulots avec son cousin Moussa dans l’espoir de rejoindre l’Europe.

Leur rêve est de devenir des stars en Europe, notamment dans l’industrie de la musique, et de signer des autographes pour de nombreux fans.

Sauf que pour y arriver, ils doivent d’abord amasser un pécule suffisant, puis tenter de convaincre les quelques rares parents qu’ils ont. Comme souvent dans ces cas, les deux jeunes vont faire fi des conseils des proches et anciens et se jeter dans la (vraie) gueule du (faux) loup.

Moi Capitaine, comme peu de films depuis quelques décennies, renseigne sur la vraie histoire derrière toutes ces histoires et drames de migrations (pas seulement pour le petit bout en mer).

Non, la traversée du désert n’est pas une partie de plaisir. Oui, beaucoup de personnes meurent sur la route. Oui, la majorité du temps, les passeurs sont des voleurs et escrocs sans scrupule. Oui, il faut mentir. Oui, on doit se frotter à des gangs organisés qui ne reculent devant aucun moyen pour piller des pauvres migrants qui n’aspirent qu’à une chose : l’espoir d’une vie meilleure.

Les scènes les plus terribles sont forcément celles qu’on imagine, la traversée du désert à travers les corps, les gangs et truands libyens et les passeurs qui ne sont jamais des philanthropes. En réalité, le risque n’est pas vraiment de mourir contrairement à une certaine croyance. Le vrai risque est de perdre ce tout mince espoir d’avoir une vie décente.

La caméra de Matteo Garronequi, à qui l’ont doit les succès Gomorra et Dogman, permet d’illustrer à quel point il faut vraiment n’avoir aucun espoir pour se jeter dans ce vide.

Saluons la performance épique des deux jeunes acteurs, Seydou Sarr et Moustapha Fall, qui brillent comme deux étoiles qui ne demandent qu’à filer dans l’industrie. Il faut savoir que c’est grâce à un casting sauvage qu’ils ont pu être sélectionnés par l’équipe du film. Mentionnons également à la trame sonore du film avec plusieurs bonnes chansons et les somptueux décors qui contrastent avec le misère humaine.

Il faut aussi mentionner le travail de recherche en amont sur le film puisque comme assez rarement, chaque personnage est assez fidèle. Par exemple, point de Camerounais pour jouer un Sénégalais, par exemple. Il faut dire que l’histoire de celui qui est finalement le héros du film est inspiré d’un récit réel (souffrez qu’on ne vous en dises pas plus sur ce site).

« J’ai voulu que ma caméra filme dans la direction radicalement opposée de celles des médias. Embrasser la perspective et le point de vue de ces personnes pour narrer ce voyage épique, fait de vie et de mort », explique le cinéaste.

« Pour pouvoir raconter de l’intérieur cette aventure pleine de dangers, il était nécessaire que je me plonge dans leur monde, si éloigné du mien, précise-t-il. Il m’a fallu pour cela construire une relation de collaboration constante avec tous ces jeunes, filles et garçons, qui ont vécu l’horreur et qui m’ont accompagné dans la construction du film. J’ai longtemps questionné ma légitimité à porter cette histoire, mais celle-ci est la leur. La clé était de pouvoir compter sur eux tant devant que derrière la caméra, afin d’être dans la démarche la plus authentique possible, loin de tout didactisme, en tant que messager discret ».

Pas étonnant donc, en conclusion que le film Moi Capitaine soit nommé à la cérémonie des Oscars dans la catégorie « Meilleur film international » que le long métrage ait remporté le Lion d’Argent pour le meilleur réalisateur ainsi que le prix du meilleur espoir pour Seydou Sarr à la Mostra de Venise en septembre dernier.

Et vous, qu’attendez-vous pour courir voir ce chef d’œuvre ?

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