Après Inyenzi ou les cafards et La femme aux pieds nues, Scholastique Mukasonga revient cette année avec un recueil de nouvelles : L’iguifou.
Parler de l’indicible, tenter de dire le génocide rwandais, plusieurs écrivains s’y sont essayés avec beauté comme Thierno Monembo ( L’aîné des orphelins). Scholastique Mukasonga, rwandaise et vivant en Basse Normandie, semble écrire pour un devoir personnel de mémoire.
Sa façon d’aborder cette histoire est sincère et déborde d’humanité. Avec son recueil de nouvelles, elle nous emmène aux prémices du génocide, à travers des yeux d’enfants. Pas de descriptions teintées ou ratées, mais l’expression de sentiments ambigus des yeux d’enfants.
Le génocide rwandais n’est pas arrivé du jour au lendemain, il s’est préparé pendant des dizaines d’années débutant dans les années 1950. Dès cette époque, une barrière entre les Hutus et les Tutsis s’est créée. C’est donc cette partie de l’Histoire que nous propose Scholastique Mukasonga.
La première nouvelle donne le nom au recueil. L’Iguifou, c’est cette faim qui s’animalise, se personnifie, créée par l’exil déjà forcé. Dans La peur, l’auteure parvient à garder en mémoire ce sentiment sans rentrer dans une description indicible. Le recueil donne aussi l’occasion de décrire le quotidien et de permettre justement de comprendre les multiples facettes de la société rwandaise. Scholastique Mukasonga y décrit par exemple la vie du personnage Helena, une prostituée que même Mubutu Sese Seko, président du Zaïre a refusé, et que la société transformera en cause du Sida.
Le style de Scholastique Mukasonga est empreint d’une douceur, d’une intimité rare. Le choix de la forme littéraire est plus que prodigieux car il laisse au lecteur, le temps d’une page blanche, se graver en mémoire ces instants offerts. L’Iguifou est un cadeau sublimé, une touche de mémoire que l’on a envie de partager avec chacun, pour que rien ne soit oublié.
Comme chacun de tes livres, il fait parti de ma bibliothèque.
A très bientôt
Aurélia