Samba Félix Ndiaye par Henri-François Imbert

Alors que le 39e Festival du nouveau cinéma de Montréal battait son plein, Touki Montréal a rencontré Henri-François Imbert. Réalisateur du documentaire Doulaye, une saison des pluies, le cinéaste français est aussi l’auteur d’un livre de 360 pages, Samba Félix Ndiaye cinéaste documentariste africain.

Vous avez connu et côtoyé le cinéaste sénégalais Samba Félix Ndiaye (Diplomate à la tomate, Lettre à Senghor, Nder ou les flammes de l’honneur), décédé le 6 novembre 2009. S’il fallait retenir un souvenir de lui, lequel retiendriez-vous ?

Peut-être son projet de créer une école de cinéma à Dakar. Samba Félix Ndiaye est retourné au Sénégal en 2004 porteur de ce projet. Il avait envie de transmettre son métier à des jeunes sénégalais et africains.  Il avait envie de le faire à Dakar.

Il n’a pas vraiment eu le temps de le développer. Il est reparti chez lui avec ce projet et finalement il s’est intégré à une structure qui existait déjà, le Media centre de Dakar. C’était une très belle idée, très généreuse, tournée vers l’avenir, vers la jeunesse.

Il disait souvent que les jeunes cinéastes africains ne connaissaient pas assez le cinéma africain.

Samba Félix Ndiaye a été l’un des premiers cinéastes africains à se tourner vers le documentaire. Croyez-vous qu’il aurait surtout retransmis ce gout du documentaire avec cette école ?

Pas absolument, parce que comme tout cinéaste, il s’intéresse au cinéma dans l’ensemble. Lui ce qui l’intéresse, c’est plus le cinéma du réel, c’est-à-dire le moment ou le cinéma nous renvoie une image de la société, du réel qui nous fait réfléchir. Et ça peut-être la fiction comme ça peut être du documentaire.

Dans le journal sénégalais Le Soleil du 12 novembre 2009, on y décrit Samba Félix Ndiaye comme un « un homme raffiné qui savait interroger les images ». Est-ce que cette image correspondait au cinéaste ?

Raffiné, oui. C’est un homme très raffiné avec une manière de parler, très agréable à écouter, une manière d’accentuer ses phrases, un rythme, une manière de sourire à l’intérieure des phares, d’animer ses phrases par quelques choses de ludique. Très raffiné dans son propos et son discours, cultivé.

Henri-François Imbert assiste à une table ronde sur le documentaire africain avec Jean-Marie Teno et Sylvain L’Espérance

Dans son film Lettre à Senghor, le cinéaste sénégalais rend d’une certaine façon hommage au premier président du Sénégal, Léopold Sedar Senghor. Est-ce que vous savez si le président sénégalais avait vu le documentaire?

Je ne sais pas si Senghor l’a vu. Il était en Normandie, il était âgé. Est-ce qu’il avait un regard pour le cinéma ? Est-ce qu’il avait envie de regarder un film qui lui était consacré ? Pas évident. Il peut y avoir une sorte de pudeur, de désir d’accorder la liberté à Félix qui fait le film. Je pense que quand on est un homme public, on doit avoir une certaine distance.

Pendant le Festival, vous avez eu l’occasion de revoir votre film, Doulaye, une saison des pluies. Quel regard vous portez encore sur un de vos films après l’avoir revu ?

D’abord, je n’ai pas vu et revu mes films. Je ne les revois jamais. Pour, Doulaye, effectivement je l’ai revu l’autre jour. Mais c’était complètement nouveau pour moi.  C’est un film que j’ai fait en 1999. Je crois que je l’avais vu une seule fois parce qu’il passait à la télévision et je voulais regarder si les sous-titres avaient été bien faits.

Ce qui s’est passé [pendant le Festival], c’est que le projectionniste de la salle m’a dit d’aller voir le match de hockey. Il m’a dit «De toutes les façons tu ne vas pas regarder ton film, tu vas aller voir le match de hockey ». Finalement, je me suis dit, pourquoi ne vais-je pas regarder mon film? Juste un peu pour me libérer de la contrainte que m’a posée le projectionniste, qui était un partenaire un peu autoritaire à ce moment-là.

J’ai vu mon film et à ma grande surprise j’ai supporté de le voir jusqu’à la fin. Ce n’est pas évident parce que c’est un film à la première personne. Il y a des moments qui sont pour moi des moments très intimes, par exemple la scène où Doulaye téléphone à mon père.

J’ai découvert [en regardant le film], à quel point il s’agissait d’un bel hommage et j’en suis content. J’ai été content de le voir et de partager çà avec le public. Je pense que dix ans après avoir fait un film, on peut le revoir.

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