Neuf cents mariages le 5 novembre et plus de 1 500 baptêmes célébrés en décembre dans la paroisse de Cibitoke au Burundi. Grâce à la persévérance du curé, les couples non mariés ou polygames marginalisés par les chrétiens renouent avec l’Église à leur grande satisfaction…
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Il y avait foule à la paroisse de Cibitoke, au nord ouest du Burundi, samedi 17 décembre. Ce jour-là 347 enfants de moins de 7 ans, tous vêtus de neuf, ont été baptisés. Trop nombreux avec leurs familles pour se tenir tous devant l’autel, ils se sont mis en longues files à l’intérieur de l’Église pour recevoir ce sacrement dont ils avaient jusqu’alors été privés.
C’est le résultat de la campagne pour un retour aux sacrements m ené par le curé de la paroisse, l’abbé Magnus Ndinze. Depuis début 2011, il a voulu faire du jubilé des 50 ans de sa paroisse, une année de bonheur, de changement et de réconciliation. En effet, de très nombreux couples, qui n’étaient pas mariés à l’Église ou les familles polygames, étaient exclus ainsi que leurs enfants de la famille chrétienne. Grâce à des séances de sensibilisation, ils ont été amenés à « renouer leurs relations avec Dieu » et à recevoir les sacrements.
Après les 900 mariages célébrés le 5 novembre, c’est plus de 1 500 enfants qui ont été baptisés en décembre dans les différentes paroisses des environs de Cibitoke. « Nous avons finalement réussi la réintégration. Les chrétiens ne venaient pas dans nos fêtes familiales et nous étions également exclus de leurs fêtes », se réjouit une vieille femme qui a fait baptiser ses enfants ce samedi de décembre après son mariage religieux en novembre.
Ce couple, qui a près de 30 ans de vie commune, regrette d’avoir été longtemps traité de « païen ». Pour certains fidèles qui estiment qu’ils ont été longtemps marginalisés par les chrétiens, ce mariage est une forme de « résurrection », disent-ils.
Un sentiment de satisfaction également exprimé par l’abbé Magnus Ndinze : « C’est une véritable réforme familiale de voir un si grand nombre de couples venus demander le sacrement du mariage et celui du baptême pour leurs enfants. »
Mariage civil et religieux
Tous les couples mariés le 5 novembre étaient venus officialiser religieusement une union déjà bien établie. La plupart des hommes étaient polygames avant de décider de se confier à l’Église catholique et de rompre avec leurs trois, quatre ou cinq autres femmes. « J’ai d’abord consulté mes trois femmes et c’est elles qui ont décidé avec laquelle je devrais me marier religieusement », confie un homme qui venait de faire baptiser ses trois enfants. Les autres femmes reçoivent alors une petite portion de terre et ont le choix de se marier ailleurs ou de rester tout simplement libres, toujours selon ce Chrétien.
« Nous prenons notre part de responsabilité dans la sensibilisation pourvu que les personnes acceptent de changer leurs mauvaises anciennes habitudes », explique le curé qui précise aussi que généralement, sur 10 mariages célébrés, sept marquent l’union religieuse de couples formés depuis longtemps. Il a des doutes sur le fait que, pour autant, les fidèles catholiques de la localité abandonnent totalement la polygamie : « Nous n’avons pas de mécanismes répressifs et l’administration n’est pas active en matière de lutte contre la polygamie. »
Les autorités locales ne semblent en effet guère enclines à sévir contre cette pratique pourtant interdite par la législation burundaise. L’abbé donne l’exemple d’un conseil communal de la province où 11 membres sur 15 sont polygames. Il insiste sur la nécessaire collaboration de l’administration à la base puisque, selon lui, la sensibilisation pour les mariages et le baptême des enfants à l’église vont dans le sens du programme du gouvernement qui veut que tous les Burundais soient inscrits dans les registres officiels de l’État civil.
Or, un couple qui célèbre son mariage religieux doit au préalable avoir célébré son mariage à la mairie.
Par Stany Ngendakumana