Au Rwanda, des produits périmés sont vendus dans des magasins et supermarchés. Les commerçants profitent du manque d’information des clients, qui ne regardent pas les dates limites de consommation indiquées sur les étiquettes. Faute de contrôles suffisants, la vigilance incombe finalement surtout aux clients.
Fin 2011, ils ont ainsi fait des contrôles à Kigali. Dans un supermarché de Remera, ils ont ainsi trouvé en rayon des jus, des sardines, de l’huile… périmés. « Nous procédons régulièrement à ces contrôles, surtout pour protéger ceux qui achètent en masse les produits divers pour les fêtes », avait alors déclaré Muhongerwa Espérance, chargée de la protection des consommateurs au Minicom. « Ces commerçants achètent des produits en grand nombre et les vendent quand bien même ils sont expirés pour ne pas tomber dans le déficit. Pour eux, le bénéfice prime sur la morale?, estime Claude Karegeya, un économiste de Kigali.
Selon lui, ces produits sont importés des pays voisins et/ou d’Europe ou d’Asie. Comme cela prend du temps pour les acheminer jusqu’aux points de vente, ils arrivent souvent juste un peu avant leur date de péremption. « De rares honnêtes marchands peuvent alors décider de les écouler au plus vite en faisant des promotions afin de ne pas perdre l’argent dépensé en taxe et en transport? explique le patron d’un supermarché de Kigali. « Quand il ne reste que plus que quelques jours, nous baissons les prix et ils alors ils partent vite », confirme Justine Ngarambe responsable de Simba, un autre supermarché chic de Kigali.
Prudence !
Peu de gens se soucient en fait des dates de fabrication et de péremption indiquées sur les étiquettes, d’autant que l’emplacement de ces mentions varie d’un produit à l’autre : tantôt près du bouchon sur les jerrycans de jus et les bouteilles de limonade en plastique, tantôt sur les couvercles des boîtes de conserve ou en dessous. De plus, il faut savoir que MAN (manufacturing date) MFG indique la date de fabrication et EXP la date d’expiration.
Ces produits vendus en promotion parce que bientôt périmés sont achetés en grande quantité surtout par les commerçants des quartiers qui les revendent alors que la date de péremption est déjà dépassée. Les clients n’ont guère de recours car, selon certains, la facture mentionne parfois que les marchandises vendues ne peuvent être reprises, ce qui freine les réclamations.
Philippe Nzayire, directeur de l’assurance qualité à RBS appelle donc les consommateurs à la vigilance : « C’est avant tout le devoir des clients de vérifier si ce qu’ils achètent ne présente pas de défaut. » Mais ce n’est pas toujours facile de se rendre compte avant l’achat de la qualité d’un produit, par exemple de la viande. Et certains vendeurs poussent à l’achat en rassurant les clients sur la qualité de la marchandise comme cet homme rencontré à l’Alimentation Saint-André, à Muhanga, qui exprimait des doutes sur des poissons séchés. Interpelée, la sœur gérante de l’alimentation a reconnu que les poissons présentés étaient bien pourris et devaient être évacués du frigo. ?Il faut de la prudence?, conseille l’homme.
Et comment contrôler la qualité des produits qui ne portent aucune indication ? Fabriqués localement avec une hygiène douteuse beignets et pains moisis se retrouvent souvent sur les étagères. Ceux qui les consomment malgré tout se rassurent en pensant que « Rien ne tue le pauvre » ou « qu’aucun Noir ne meurt de la saleté. » Une croyance fausse car les intoxications alimentaires et les diarrhées sont fréquentes en Afrique, et parfois mortelles.
Selon Dr Mark Cyubahiro Bagabe, directeur de RBS, plus de six laboratoires ont été mis en place pour contrôler la qualité des produits importés comme exportés et des agents de cet office sont présents aux frontières pour vérifier leur qualité. ?Nous avons aussi formé plus de 550 personnes travaillant dans les industries et usines locales du riz, du lait, du thé, etc. à la fabrication de produits conformes aux standards internationaux. »
Si les agents du Minicom, de RBS et l’association ADECOR de défense des consommateurs font leur possible pour contrôler la qualité des aliments, leurs effectifs sont insuffisants par rapport aux besoins dans le pays. ADECOR, par exemple, n’a pas d’employés réguliers dans les régions. Selon la législation rwandaise, toute vente de produits périmés, dénaturés, ou non conformes aux spécifications constitue une infraction aux règles de la commercialisation rwandaise. Un principe sain, mais une application encore limitée.
Par Fulgence Niyonagize