Longtemps restés intouchables, les responsables de différents services publics ont été interpellés par la justice. La société civile encourage cette lutte contre l’impunité et demande que des sanctions administratives soient toujours accompagnées de sanctions pénales.
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La loi est dure mais c’est la loi. Longtemps impunis malgré les nombreuses plaintes des ongs et des usagers des services publics, certains responsables de l’administration sont actuellement aux arrêts. En deux mois, cinq responsables des services publics ont été interpellés par le Parquet général de Kisangani. Il s’agit du chef de division des Mines et de l’un de ses chefs de bureau, du chef de la sous division de l’Enseignement primaire et secondaire, le conservateur des titres fonciers de Kisangani sud, un inspecteur de la direction générale des impôts.
Les uns sont toujours en prison et les autres ont bénéficié de la liberté provisoire. “Ils sont accusés de corruption et de détournement”, indique le procureur général de Kisangani, très déterminé à appliquer la loi.
D’autres responsables de services publics ont été eux suspendus de leurs fonctions. Le 23 janvier, le directeur provincial de la Société congolaise des postes et télécommunications (SCPT) a été suspendu par l’administrateur directeur général pour vente illicite de câbles téléphoniques et d’un terrain de la cette entreprise à Bunia.
C’est le cas également du chef de collectivité secteur Lubuya Bera pour vente illicite de terre, selon le maire de la ville.
“C’est une avancée significative si les gens commencent à prendre le courage de dénoncer et de porter plainte en justice, contre le détournement de l’argent public par responsables administratifs”, estime un magistrat.
“La justice a le pouvoir d’interpeller n’importe quelle autorité publique sur sa gestion”, estime le ministre Jean-Claude Esuka, porte- parole du gouvernement.
Souvent les chefs de l’administration sont suspendus de leurs fonctions puis réhabilités. Ils ne sont pas poursuivis pénalement même si les arrêtés de leurs suspensions parlent expressément “de détournement ou mégestion”. Pour Ferdinand Ntabyo, de l’ong Congo en Images, cette suspension administrative seule ne suffit pas, il faut traduire les détourneurs en justice afin de lutter contre la mauvaise gestion. Il ajoute que ces suspensions ne doivent non plus avoir des mobiles politiques
Satisfaction de tous
Les syndicalistes saluent ces sanctions et interpellations judiciaires. “C’est une bonne chose si les autorités matérialisent le voeu du président de la République sur la tolérance zéro” applaudit Réné Menga de l’intersyndicale de la fonction publique, “qui depuis 5 ans dénonce ces malversations”. Pour un agent public, “Ces arrestations constituent un ouf de soulagement pour les travailleurs”. “Si ceux qui violent la loi sont sanctionnés en justice, les gens auront peur de commettre des actes interdits”, martèle Jean Claude Esuka, ministre de l’Agriculture et porte-parole du gouvernement provincial. Selon Ferdinand Ntabyo, ces sanctions peuvent servir d’exemples de lutte contre l’impunité pour d’autres responsables de l’administration. Le porte parole du gouvernement souligne que les multiples plaintes de détournement des salaires des fonctionnaires par certains comptables publics devraient aussi intéresser la justice.
Par Hortense Basea
Des hommes de loi aussi aux arrêts
Cette lutte contre l’impunité n’épargne pas les magistrats et avocats qui sont les premiers à dire le droit. Depuis mi janvier, un défenseur judiciaire est détenu à la prison centrale pour avoir facilité la fuite d’un inculpé au Parquet de grande instance de Kisangani. Mais le corps des défenseurs judiciaires a marché pour réclamer sa liberté provisoire. “Deux magistrats dont un du Tribunal de grande instance de Kisangani et un autre de Bunia font l’objet de poursuites judiciaires”, informe un magistrat du Parquet général de Kisangani. Lors de la cérémonie d’échange de vœux de nouvel an, le procureur général a mis en garde les magistrats contre les arrangements des procès et le marchandage des libertés provisoires. Des comportements qui ternissent, selon lui, l’image de la justice auprès des justiciables. Le Bâtonnier avait à son tour pendant l’assemblée générale annuelle de l’ordre des avocats en fin 2011 fustigé certains avocats qui demandent de l’argent aux clients pour arranger des procès.
Hortense Basea