En cette fraîche fin de semaine du 28 octobre, il était possible de se réchauffer en se rendant au Théâtre Saint-Denis. L’humoriste Eddy King donnait aux Montréalais l’occasion d’assister à deux représentations supplémentaires de son premier spectacle solo éponyme.
Après bientôt une année à parcourir la Belle-Province, l’hilarant Eddy King était de retour sur la scène du Théâtre Saint-Denis, salle qui avait lancé le début de sa tournée (lire la critique). Et pour ces deux dernières dans la métropole, l’humoriste était visiblement en pleine forme !
Le spectacle a commencé par la voix préenregistrée de sa mère qui se charge de présenter le jeune Edgar (son véritable prénom) au public.
C’est sur cette introduction un brin décalée que le très swag Eddy King est monté sur scène, avec pour seul décor son nom en grosses lettres lumineuses derrière lui. Autobiographique, son spectacle se veut un récit criant de vérités sur son parcours entre la France et le Québec en passant par le Congo.
Eddy est un gars du ghetto. Élevé par une mère monoparentale, il grandit à Goussainville en banlieue parisienne. Son enfance est marquée par la dureté de la vie en cité où les plus grands n’hésitent pas à jouer de ruse pour voler les vélos des plus petits et là où « la seule blanche sur la photo de classe c’est la prof ».
Ces petites anecdotes croustillantes du quartier lui permettent de dénoncer en fond des stéréotypes racistes largement répandus.
«En France, le racisme est à un autre niveau, c’est du racisme de compétition. Ici, le racisme est « cute ». Les gens racistes ont au moins la gentillesse de commencer par: j’ai rien contre les gens comme vous…»
S’il a grandi en France, Eddy King a aussi vécu au Congo, son pays d’origine. «Mon seul souci en partant là-bas, c’était d’avoir un billet de retour.» Il en profite au passage pour envoyer quelques piques à l’ancien colonisateur Belge mais surtout il remet les pendules à l’heure avec l’illustrateur Hergé et son album Tintin au Congo.
Dans la première partie de son spectacle, le fils Edgar parle souvent de sa mère avec tendresse et raillerie. D’une certaine manière, il rend hommage et remercie à sa façon celle qui a toujours été là pour lui.
Il raconte également la touchante rencontre entre sa tantine Annette et son mari Joseph, improbable histoire d’amour entre une Guadeloupéenne un peu rêveuse et un Africain de la vieille école. Un délicieux moment où Eddy King montre qu’il excelle également dans l’art de faire les accents.
La seconde partie du one man show porte un regard avisé sur la société québécoise, ses mérites mais aussi ses contradictions. En exemple parfait de la diversité, cet « homme et demi » ou « aux trois moitiés » (comme il se surnomme) traite de son arrivée au Québec et le choc des cultures qu’il a dû affronter. «On est arrivé en pleine crise d’Oka et on ne comprenait pas pourquoi vous vous disputiez. Canadiens et Québécois, c’est la même chose, non?».
Cette partie du spectacle se veut aussi un peu plus politique abordant le référendum de 1995, le premier ministre Stephen Harper, « une version light de George W. Bush» ou encore l’élection présidentielle de Barack Obama.
Devant une salle comble, Le Roi Eddy a montré qu’il maîtrise parfaitement la scène et qu’il sait jouer avec le public. Totalement à l’aise dans ses baskets, le comédien enchaîne les punchlines redoutables qui font mouche à chaque fois.
Décomplexé, ce stand-Up de presque deux heures ne tombe pas dans le vulgaire et apporte une analyse à la fois juste et critique sur les maux de notre société.
En première partie d’Eddy King, l’excellent Neev s’est chargé de préchauffer la salle.