Le Franco-rwandais Gaël Faye a sorti en février 2013, au Québec, Pili Pili sur un croissant au beurre chez Universal, un album où il est surtout question d’identité, d’exil et de blessures profondes. Il s’agit d’un premier album solo pour celui que Grand Corps Malade qualifie de «plus belles claques artistiques».
Le titre A-France, à lui seul, résume le tiraillement de l’artiste entre ses deux cultures, européenne et africaine. Français par son père, rwandais par sa mère, Gaël Faye est né en plus en 1982 à Bujumbura, au Burundi. Il n’a que treize ans, lorsqu’il quitte, malgré lui, son pays natal, en proie à la guerre, pour rejoindre la France.
Les titres Metis et Je pars restent dans la même veine de questionnement par rapport à cette double culture, ce métissage, mais également l’exil et le génocide. «Ma peine, ma vraie nature», chante-t-il. Sa musique s’exprime comme une saudade, sorte de mélancolie empreinte de nostalgie, sans l’aspect maladif. «Ciao, je me casse», ajoute-t-il.
Même lorsqu’il parle de femme, il est encore question de bombe. «Il y a les femmes, et la mienne […] Ma femme elle est trop belle, regarde sa peau couleur safran […] C’est la reine de sabbat, etc.»
Membre du groupe de rap Milk Coffee & Sugar, avec Edgar Sekloka, Gaël adopte par moment un style qui ressemble un peu à Bisso na Bisso, à leur meilleur, par exemple sur le titre Bouge à Buja, avec en filigrane une influence de rumba et soukous.
Gaël Faye a un flot puissant et son verbe est vif comme un sabre, ou une machette. « [Il propose des textes poignants sur des mélodies live et « sucrées »», explique-ton dans sa bio.
Lorsqu’on prend le temps d’écouter les paroles et qu’on tente de faire abstraction de la musique, ce qui n’est pas évident, on sera surpris par la puissance des mots du jeune expat, parti de son Buja et qui s’était promis de devenir ministre.
Sur Isimbi qu’il chante avec Ben l’Oncle Soul, qu’il a rencontre grâce à Guillaume Poncelet, son producteur, Faye laisse parler son talent de slameur, accompagné par la voix soul de Ben.. «Isimbi, c’est ton nom..parcequ’il fallait être deux pour faire trois […]
Bienvenue ma princesse, bienvenue dans la vie […] Isimbi, le noyau de mon fruit!»
Ben l’Oncle Soul, grâce à Guillaume Poncelet (aux manettes du premier album de Ben L’Oncle Soul, n’est pas le seul qui a collaboré à Pili Pili Sur Un Croissant Au Beurre.
L’icône de la musique lusophone, Bonga, et Tumi Molekane (MC sud africain de Tumi & The Volume) sont aussi de la partie et permettent de voyager un peu, dans la musique, du rap au soul, du jazz au semba (voyage entre Cap Vert et Angola), et bien entendu de la rumba congolaise, au sebène.
Bref, Pili Pili Sur Un Croissant Au Beurre est un album teinté d’influences plurielles, «joué par 28 musiciens pour un son live enregistré entre la France et le Burundi qui porte la beauté des textes de Gaël Faye».
Photo : Courtoisie Facebook