Dans la section Regards sur les cinémas du monde du Festival des Films du monde édition 2014, le dernier film du réalisateur égyptien Mohamed Khan, Fatat el Masnaa, a été projeté les 30-31 août et 1er septembre au Quartier Latin.
Hiyam (interprétée par Yasmin Raeis), jeune ouvrière travaillant dans une usine à textile la semaine, s’éprend du nouveau patron de l’entreprise, Monsieur Salah (interprété par Hany Adel). Rêvant de passion et de mariage, Hiyam voit son cœur se briser lorsqu’après un échange de baiser, Salah décide de ne plus entretenir de contact avec elle.
Alors qu’elle se remet doucement de son échec amoureux, un test de grossesse est découvert dans une poubelle de l’usine. Rapidement, tous les soupçons se tournent vers Hiyam. Cette dernière est accusée d’avoir déshonoré sa condition de femme pure ainsi que les mœurs de sa famille, gérée d’une main de fer par sa mère divorcée et remariée (interprétée par Salwa Khattab).
Scénarisé par Wessam Soliman, Fatat Al Masnaa se dessine comme une comédie romantique avec une bande sonore composée de nombreuses chansons d’amour du répertoire classique égyptien et les étapes traditionnelles de la première rencontre, du premier regard, des premiers contacts.
Le revirement dramatique suite aux maltraitances subies par Hiyam lorsqu’est remis en doute sa sincérité quant à sa virginité, rappelle toutefois d’une part la réalité brutale à laquelle sont confrontées quotidiennement de femmes égyptiennes (et plus globalement de certaines femmes arabes), d’autre part la volonté du réalisateur et de la scénariste de dresser le portrait d’une femme qui se veut indépendante dans un univers qui ne le cautionne pas encore.
Alors que les hommes y sont quasiment inexistants – hormis Salah, l’on ne voit que très peu, le beau-père d’Hiyam ainsi que les autres pères de famille –, l’on sent toutefois peser lourdement tous les carcans sociaux hérités d’un système érigé par et pour le patriarche ; carcans sociaux banalisés, normalisés et (toujours) entretenus avec opiniâtreté par les femmes elles-mêmes.
La scène de la baignade est un exemple parfait des décalages dans la conception de la liberté masculine et féminine : alors que Salah s’y baigne en maillot de bain et cela en toute quiétude, toutes les femmes de l’entreprise plongent dans l’eau entièrement habillée. Si la liberté vestimentaire et religieuse n’est ici pas remise en question, la liberté de vivre sa vie en dehors de toute conception moraliste rigoriste imposée non par soi mais avant tout par les autres est quant à elle, questionnée et plus particulièrement, les conséquences terribles de ce choix de liberté au détriment de la soumission aux règles.
Si Fatat Al Masnaa s’empare ici de sujets d’actualité sociopolitiques intéressants, loin de tout exotisme et de tout romantisme, on regrette cependant le traitement cinématographique plat et linéaire, faisant du film d’une heure et demie, un long-métrage monotone.
Fatat Al Masnaa (ou Factory girl en anglais) s’est vu récompenser à deux reprises l’an dernier : le Muhr Award de la meilleure actrice pour Yasmin Raeis et le FIPRESCI feature award lors de la 10e édition du Dubai International Film Festival (DIFF).
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