Réalisé par Lemine Ould Salem et François Margolin, le long-métrage Salafistes a certainement de quoi choquer, mais reste nécessaire si l’on souhaite comprendre la doctrine. Un documentaire qui était à découvrir dans le cadre du Festival Vues d’Afrique de à Montréal.
Tout commence par un hommage des réalisateurs aux victimes des attentats. Comme s’il fallait s’excuser, dés le départ, de certains propos virulents et de certaines images sanglantes. Des paroles qui sont diffusées sans être contrôlées ou censurées. Parce qu’il semble urgent de comprendre ce qu’il se passe dans la tête de ces « fous de Dieu ».
Nous sommes en 2012, à Gao, ville située dans le nord du Mali, contrôlée par des groupes islamistes radicaux, les Salafistes. Dès les premiers plans, Lemine Ould Salem et François Margolin nous emmènent avec eux pour une ronde avec la police islamique. Leur mission principale, contrôler la tenue vestimentaire des femmes et s’assurer que les hommes ne fument pas, ne boivent pas d’alcool et que le calme règne.
Le premier homme qui prend la parole est un dirigeant d’Al-Quaïda au Maghreb islamique (AQMI) qui, après le soulèvement touareg, a pu prendre le contrôle du nord du Mali. Oumar Ould Hamaha dit « Barbe Rouge », à cause de son usage du henné sur sa barbichette. Un usage qu’il fait afin de se distinguer des juifs et des chrétiens. Ces déclarations sont dites avec la plus grande sincérité, sans aucune gêne, encore moins pour l’Occidental choqué par ses propos.
En toute arrogance
Salafistes a été réalisé sur trois années. Comme si le temps était notre meilleur allié pour que l’on puisse comprendre et encaisser les conséquences de la radicalisation et de l’extrémisme, tel qu’il nous est révélé.
Il faut dire que pour regarder jusqu’au bout ce film, il est nécessaire d’avoir le cœur bien accroché et de se rappeler qu’il s’agit d’un mouvement radical qui fustige des valeurs qui nous sont chères: la démocratie, l’égalité entre les hommes et les femmes ou encore le djihad de façon à imposer par la force cet islam qu’ils se disent les seuls à pratiquer correctement. N’en déplaise à ceux et celles qui penseront le contraire.
Les images sont parfois violentes, mais sont dignes d’un bon film de guerre commandité par Hollywood. Elles révèlent à quel point ces groupes sont doués et maitrisent des techniques et connaissances afin de promouvoir la doctrine à travers le monde.
Certaines scènes interpellent plus que d’autres, comme celle des hommes accusés d’homosexualité projetés du haut d’un édifice ou encore celle de l’exécution d’un meurtrier, sous la demande de la mere de la victime. Même les voleurs sont sondés juste après leur sentence afin de savoir ce qu’ils retiennent de leur acte et ce qu’ils pensent de leur punition. Mais, avec une main coupée, sur un lit d’hôpital, il semble délicat de contredire l’autorité en place qui est persuadée d’être dans le vrai.
Une mention spéciale doit être faite à ces jeunes tunisiens novices dans le mouvement qui en profitent pour créer toutes sortes de stratagèmes commerciaux. Car, comme ils disent, « On peut faire le djihad avec une paire de baskets Nike. L’un n’empêche pas l’autre. »