Après avoir adapté L’Étranger et la nouvelle L’Hote d’Albert Camus, le bédéiste Jacques Ferrandez récidive avec succès avec Le premier homme, le dernier roman, inachevé, du prix Nobel de littérature en 1957.
Publié comme les deux autres dans la collection BD de la maison d’édition Gallimard, cette somptueuse adaptation du roman Le premier homme se déroule en Algérie évidemment pour la plupart du temps. Il faut dire que la famille de Jacques Ferrandez a eu un commerce sur la même rue (de Lyon), en face de la famille d’Albert Camus.
Avec le travail qu’il a accompli depuis, le bédéiste s’est quelque peu approprié cet endroit d’Alger si particulier pour lui qu’est le quartier Belcourt dans lequel il a par ailleurs, vu le jour, en 1955.
L’histoire est celle d’un certain Jacques Cormery, qu’on devine aisément être Camus, qui à la recherche de son passé et d’indices sur la vie de son père retourne dans les endroits de son enfance tel un archéologue voir ce que le temps a pu laisser comme trace.
Du médecin qui l’a mis au monde au professeur qui lui a transmis le besoin d’apprendre, de la mère toujours présente, quoique silencieuse (…), à l’oncle Ernest toujours taquin, l’auteur a entrepris son roman avec un certain goût du détail.
C’est en fouillant les décombres qu’on retrouvera le manuscrit de 140 pages du « Premier homme », dans une sacoche en cuir de l’auteur. L’histoire raconte une Algérie encore compliquée. La famille décide, non sans peine de prendre le temps de déchiffrer l’écriture et d’attendre que le temps fasse son effet.
« À la recherche de ses origines, il y évoque avec une singulière tendresse son univers familial, le rôle des femmes, celui de l’école, la découverte du monde extérieur… En filigrane, on découvre les racines de ce qui fera la personnalité de Camus, sa sensibilité, la genèse de sa pensée, les raisons de son engagement. »
Le roman inachevé est finalement publié en 1994 chez Gallimard par Catherine Camus, sa fille. Et c’est dans la foulée qu’un certain Jacques Ferrandez lira l’ouvrage.
Comme souvent avec lui, l’adaptation est juste, fidèle, et même des images réelles s’y retrouvent. Mais avec ce chef-d’œuvre autobiographique qu’est Le premier Homme l’occasion était trop belle pour insérer de la fiction, justement là où Albert Camus n’a pas eu la chance de préciser le fond de sa pensée.
Rappelons que José Muñoz avait aussi sorti une version illustrée du Premier homme, en 2013, dans la collection Futoropolis.
Préfacée par Alice Kaplan, la BD fait 184 pages (210 x 280 mm).