Scénarisé par Mathias Énard et Zeina Abirached, la superbe BD Prendre refuge (Casterman) raconte deux histoires d’amitiés et surtout d’amour presque impossible qui se déroulent dans le Berlin d’aujourd’hui et l’Afghanistan de l’entre-deux-guerres.
Au-delà de l’histoire, cette BD est avant tout un chef-d’oeuvre artistique où les paysages de l’Afghanistan sont extraordinairement mis en valeur dans un style blanc et noir assez particulier, de prime à bord, mais qui au final est justement très approprié et même bluffant.
Il y a d’un côté l’histoire bouleversante de cette réfugiée syrienne, Nayla, qui se retrouve en Allemagne et rencontre un jour de kermesse le jeune Berlinois Karstsen, en 2016. Il tentera, tant bien que mal de s’adapter à sa nouvelle vie.
Et en même temps, les auteurs transportent les lecteurs en 1939 en Afghanistan, aux pieds des Bouddhas de Bâmiyan où une voyageuse européenne, Anne-Marie Schwarzenbach, s’éprend éperdument d’une archéologue tout en apprenant à la radio le début de la Seconde Guerre mondiale.
«Alliant les contraires, rapprochant des êtres qui n’auraient jamais dû se croiser, l’album propose une réflexion sur la difficulté d’aimer aujourd’hui comme hier», peut-on lire dans le résumé de cette époustouflante BD.
C’est la brillante Zeina Abirached qui s’est occupée d’illustrer cet album sublime. La native de Beyrouth, au Liban, a déjà publié Beyrouth Catharsis, 38 rue Youssef Semaani et Mourir Partir Revenir, le jeu des hirondelles, publié aux éditions Cambouraki, et notamment salué au festival de la BD d’Angoulême en 2008.
Quant à Mathias Enard, on lui doit Boussole, prix Goncourt en 2015 et Parle-leur de batailles, de rois et d’éléphants, prix Goncourt des lycéens en 2010.