Après la sortie du très intrigant titre Je suis Africain, l’album complet du très regretté Rachid Taha est enfin disponible. Fidèle à ce qu’il a toujours été, le chanteur franco-algérien y laisse ses tripes et sa passion.
De son titre Agatha, une reprise de l’artiste camerounais Francis Bebey à Je suis africain, Rachid Taha n’a pas vraiment trop changé. Il est resté un fervent militant humaniste qui ne rêvait que d’un monde meilleur et plus juste pour le plus petit dénominateur commun.
Souvent acclamé, parfois critiqué, jamais oublié, Rachid Taha est mort, il y a un an, à Paris en laissant toutefois un testament musical.
«Je suis africain, de Paris à Bamako, de New York au Congo», confie-t-il dans la chanson titre de cet énième opus réalisé et co-écrit par Toma Feterman, fondateur de La Caravane Passe.
En partant, celui à qui l’on doit les reprises de Douce France, Ya Rayah et Rock el Casbah, a aussi laissé orphelin beaucoup de personnes comme son fils Lyes, son ami Toufik, son joueur de mandole Hakim Hamadouche, ainsi que son ancien clavier Yves Fredj Aouizerate, qui fut son dernier manager. Pour ne citer que ceux-là.
Rachid n’avait que 59 ans.
Sur cet album, il y a beaucoup à dire. D’abord les noms de gens pour qui il vouait un grand respect. Citons Bob Marley, Malcom X, mais aussi Oum Kalthoum, Andy Warhol (dans le titre Andy Walhoo) ou encore Kateb Yacine, Franz Fanon, Patrice Lumumba, Angela Davis. En quelque sorte tous étaient des Africains comme lui.
Chantre d’une musique qui se voulait pas définition métissée comme le monde, Rachid Taha ne délaissait jamais son rock-châabi aux accents arabo-punk-électro avec guitares, balafon et guimbarde, teinté de youyous, flûtes, chœurs de femmes ou mandole. Ouf !
En français comme en arabe et même en anglais (Like A Dervish), cet héritage se décline en dix chapitres s’ouvrant sur le titre Ansit et se terminant, comme par magie, par Happy End.
«Ma langue, c’est l’arabe; ce n’est pas l’arabe du coin. Ma langue, c’est l’arabe, celui qui te retient »
Il est clair que le titre Wahdi, au rythme gnawa, que Taha a chanté avec la talentueuse chanteuse suisso-algérienne Flèche Love, de son vrai nom Amina Cadelli, se fera une petite place dans le cœur de plusieurs.
Rachid Taha a rendu l’âme, le 12 septembre 2018 après un arrêt cardiaque. Il travaillait depuis deux ans déjà sur cet album, malgré les effets paralysants de la maladie d’Arnold Chiari, une malformation rare congénitale du cervelet.
Natif à Saint-Denis-du-Sig, près d’Oran, il a grandi à Sainte-Marie-aux-Mines, en Alsace, avant de finalement devenir Lyonnais d’adoption. Sa voix rauque a marqué les esprits ici comme ailleurs. C’est le cas lors d’un évènement de clôture en extérieur du festival du jazz ou lors de ses innombrables spectacles au Métropolis ou ailleurs au Québec.