L’affiche provocatrice du film Mignonnes montrant quatre fillettes de 11 ans habillées comme les danseuses sexy des clips vidéo a fait couler beaucoup d’encre. Sorti au cinéma en Europe depuis le 19 août, le long métrage n’a été disponible que récemment pour le reste du monde sur Netflix.
L’affiche du film officielle en France et celle choisie maladroitement (ou pas) par Netflix aux États-Unis ont en commun des tenues de danse moulantes sans les poses suggestives qui ont fait débat.
Avant de polémiquer, il aurait fallu pourtant se rendre au moins aux premières minutes du film pour comprendre de quoi on nous parlait.
Au premier plan, on rencontre une gamine de 11 ans (Amy) sur scène, en tenue de danse sexy et en larmes. Au second plan, une histoire de malaise est racontée par la réalisatrice franco-sénégalaise Maïmouna Dacouré.
Il s’agit d’un malaise à la fois culturel, éducatif, religieux, générationnel et sociétal. Et bien souvent, ce malaise-là, qu’il soit assumé pleinement ou non, crée du grabuge. Encore plus lorsqu’il chatouille les codes de familles ou qu’il reproduit des tendances de twerk qui font le top des chaînes YouTube et des réseaux sociaux.
« Sois une vraie femme…»
Ce qui choque, c’est en réalité de voir à l’écran une image de l’enfance qui n’est plus tout à fait innocente, car noyée par l’importance des likes et des «qu’en-dira-t-on».
Amy est tiraillée entre les règles de sa famille, musulmane conservatrice, et son attrait pour la danse et les chorégraphies en vogue sur les réseaux sociaux qu’elle découvre avec des filles populaires de l’école.
Alors non, il ne s’agit pas ici de promouvoir l’hypersexualisation des jeunes filles, mais plutôt de la dénoncer. Après tout, il faut vraiment vivre dans une société parallèle pour ne pas voir ce qui a du succès en ligne, en termes d’image féminine.
En filigrane, on se retrouve face à des pré-ados ou adolescentes qui cherchent à plaire aux garçons, désobéissent, mentent et volent leurs parents. Elles découvrent leur corps par la sexualité désapprise et cherchent à apprivoiser leurs premières menstruations. On comprend bien que l’éducation sexuelle saine, c’est finalement ce qui leur fait défaut.
On est plongé pendant ces quelques minutes avec Amy. Comme la plupart des filles de 11 ans, elle se cherche un modèle féminin fort qui sache lui expliquer qu’en réalité, elle n’a pas à twerker ou à friser la vulgarité pour exister ou faire sa place. Tout comme elle n’a pas à passer des heures dans la cuisine avec une tante à cuisiner toute la sainte journée pour devenir une vraie femme.
Une invitation à la réflexion
Mais comment le comprendre à son âge alors que les adultes semblent bien loin de sa réalité? Après tout, papa est au bled et il impose sa polygamie à une maman déjà bien occupée avec trois enfants.
La même mère, devant les voisines, doit sourire et se réjouir de ce second mariage, alors qu’en réalité, elle hurle de douleur seule dans sa chambre. Enfin presque, parce que ce soir-là, Amy était cachée sous le lit à regarder des vidéos de danse sur un téléphone volé au cousin, surprise de découvrir la fragilité de sa maman.
Mention spéciale pour cette dernière qui finalement lui autorisera à la fin à redevenir une enfant. Des modèles, Amy ne peut pas trop les trouver du côté de ses amies non plus, qui ont, soit des parents trop occupés à travailler, soit des grands frères ou cousins qui les voient encore comme des gamines. « Mes parents disent que je suis une mauvaise fille, mais les gens m’aiment bien, regarde le nombre de likes qu’on a eu! », lui assure son amie Angelica.
La danse, les tenues sexy ou les poses suggestives sont peut-être finalement plus que ce qu’on veut bien nous faire croire. Et si Amy, 11 ans, nous renvoyait simplement en pleine figure faire nos devoirs d’adulte ?
Le synopsis:
Amy, 11 ans, commence à se rebeller contre les traditions de sa famille conservatrice quand elle devient fascinée par une troupe de danse à l’esprit libre.
Avec: Fathia Youssouf,Médina El Aidi-Azouni,Esther Gohourou