Charismatique, honnête et créateur dans son ADN, Yves Ulysse sait rassembler le meilleur de ses expériences pour viser haut. Le créateur de Mode Masculine Montréal (M3) se confie sur son cheminement dans le monde de la mode et rappelle que les piliers fondateurs de notre destin se trouvent sur notre chemin.
Plusieurs le connaissent pour son travail dans le milieu de la coiffure. Il a aussi travaillé en salon, mais aussi sur plusieurs plateaux de télévision et de cinéma.
Quand avez-vous commencé dans ce domaine?
Il y a environ 25 ans et oui, j’ai rencontré des difficultés. Dans mes débuts et même plus tard, j’ai ressenti un sentiment d’exclusion. Je recevais des commentaires par lesquels on tentait de « me mettre à ma place ».
On me disait que j’étais exubérant. Ce n’était pas toujours fait de manière claire, mais on tentait de m’intimider.
À travers les années, j’ai aussi beaucoup travaillé dans l’événementiel, le nightlife et sur une méga production québécoise. Quand tu es un créateur, tu as une vision que tu veux réaliser pour inspirer les autres.
En tant que seul Noir sur cette méga production québécoise, je ressentais que certaines personnes avaient des comportements arides avec moi alors que ces mêmes personnes étaient plus conviviales avec des personnes blanches. Comme je suis quelqu’un qui ne me prend pas trop la tête, j’en ai fait le constat, mais sans plus.
Aviez-vous un mentor et des personnes qui vous inspiraient à vos débuts?
Je n’avais pas de mentor. C’est ma créativité qui m’a vraiment sauvé de toutes mes embûches. Depuis tout jeune, j’avais une foi en mes capacités. Petit, je remarquais que j’attirais l’attention lorsque je m’exprimais à travers les arts; par exemple, dans mes cours d’arts plastiques, mes dessins étaient toujours affichés à l’école; en danse aussi, j’avais un talent.
Je gagnais en popularité à l’école, j’étais apprécié auprès de mes amis et ils me faisaient sentir spécial grâce à ma créativité. Cela m’a donné beaucoup de confiance en moi et je me suis accroché à ma créativité en grandissant.
Avez-vous toujours eu une vision à long terme de votre carrière?
Non, la vision à long terme de ma carrière est arrivée sur le tard. Donc, je prenais les opportunités qui s’offraient à moi – j’ai pris part dans le démarrage de plusieurs projets comme les clubs after-hours Stereo et Circus et le premier Bal en Blanc.
La mode était quelque chose que j’ai évité pendant longtemps pourtant j’aime la mode, la créativité à travers les vêtements. Mon entourage reconnaissait que j’avais des aptitudes – moi aussi je savais que j’avais du talent, mais je n’arrivais pas à y voir du long terme.
En 2015, Close Access TV est officiellement lancée. Quel a été l’élément déclencheur de cette WebTV et aviez-vous un peu la frousse de vous lancer dans ce projet?
Je n’avais pas peur, mais je dois avouer que je ne suis pas quelqu’un qui aime être devant la caméra. En 2014, je travaillais sur une production que j’ai finalement quittée. En jasant avec une amie qui était sur la production d’un évènement de mode urbaine, elle m’a demandé si je voulais participer en tant que coiffeur; j’ai accepté, mais je lui ai aussi proposé mes services pour la direction artistique de son évènement.
À deux semaines de l’évènement, j’ai pris en charge la direction artistique avec des gens que je connaissais. Dans le cadre de cet évènement, j’ai essuyé un refus quand j’ai tenté de créer une facette média à cet évènement. Pour moi, à ce moment-là, c’était un refus de trop. Révolté, je me suis dit, je vais créer ma propre plateforme média qui portera sur la culture, le divertissement et la mode.
Close Access TV a vu le jour – on a développé des partenariats avec Ford, l’Opéra de Montréal, l’École Supérieure de Ballet, le Cirque du Soleil et plusieurs autres. Close Access TV m’a permis de rencontrer un vaste éventail de gens et d’assister à des évènements comme Toronto Men’s Fashion Week.
M3 – Mode Masculine Montréal a vu le jour en 2017. Des designers et mannequins connus de la grande famille de la mode se sont affichés et associés à M3. Comment vous sentez vous aujourd’hui devant la réalisation de ce projet?
Je regarde tout ça et je me dis toujours, qu’est-ce que je peux faire d’autres!? Je regarde en avant. Je reste dans l’expérience que je veux faire vivre au public.
Récemment, vous avez collaboré avec BFBG awards à titre de Directeur de création. Quelles sont les qualités qui permettent de s’impliquer au niveau créatif tant dans la mode masculine que féminine. Est-ce que le processus créatif est différent?
Plus jeune, quand je faisais du dessin de mode, je dessinais des femmes. La femme pour moi demeure une représentation de la beauté et de la divinité, une femme forte, puissante et totale. Cette séance de photo a été très agréable. Quant à l’homme, je puise mon inspiration dans l’expérience glamour que je veux lui transmettre. Je peux travailler avec les deux.
Que dirais-tu à un jeune Noir qui hésite à se lancer dans le monde de la mode et la création artistique?
Dans le monde des arts, quand c’est beau, quand les gens sont émerveillés, c’est que tu touches le cœur et les gens ne voient plus ta couleur de peau. Il ne faut pas écouter les critiques négatives et ne pas donner raison à ceux qui ne veulent pas ta réussite.
Pour finir, quelle est la phrase-clé qui te définit?
« If it’s not good enough for me, it’s not good enough for my clients »
Crédit photo: Marcel Cristocea