Programmé au Festival Vues d’Afrique à Montréal et au Festival Cinéma du Monde de Sherbrooke, le long métrage Twist à Bamako de Robert Guédiguian raconte le Mali des années 60, postindépendance, et ce, par le prisme de la lentille du talentueux photographe Malick Sidibé.
Pendant près de deux heures, le spectateur (re)vit l’ambiance et l’atmosphère d’un Mali qui se trouve au carrefour de son avenir, entre le socialisme du président Modibo Keita, le twist (et le modernisme) hérité de la France et le conservatisme d’une société ultra traditionaliste.
C’est dans ce contexte que le jeune militant rêveur Samba, fils d’un riche commerçant de bazins (interprété magnifiquement par Stéphane Bak), croise le chemin (destin ?) d’une jeune fille mariée de force, Lara (Alicia Da Luz Gomes).
Le premier imagine un Mali adoptant un code de la famille inspiré des valeurs du socialisme (et du progressisme) tandis que la seconde sait très bien que son sort ne dépend que des hommes élevés dans une société très paternaliste qui n’a que faire de son opinion.
C’est l’amour du Twist et du rock’n’roll, à la grande époque de John Halliday et Claude François, qui va les réunir aussi bien sur la scène des mythiques clubs de danse de Bamako que dans le tourbillon d’une passion amoureuse, malheureusement interdite.
Sauf que l’idéal socialiste va vite se transformer en dictature au gré des résistances d’un peuple pas forcément prêt à tous les changements, au premier rang duquel les commerçants de Bamako, comme le père de Samba, ou les chefs de village comme le beau-père de la jeune Lara.
Tout ce monde va vite déchanter au gré des actions de plus en plus radicalisées du pouvoir en place. Comme exemple, signalons par exemple la décision fortement contestée de passer du Franc CFA au Franc Malien.
Le réalisateur français Robert Guédiguian a su capter la volonté de liberté du peuple malien et sans doute des autres sociétés africaines au lendemain des indépendances.
Les nombreux clichés inspirés de l’oeuvre de Malick Sidibé donnent du poids au scénario tout comme l’univers musical composé par Olivier Alary (La nuit des rois, Lemonade) qui plonge le spectateur dans l’époque.
Le cinéaste conclut même avec brio son 22e film en y allant d’un clin d’oeil à l’actualité brûlante en montrant des scènes d’un Mali un peu sous l’emprise de fondamentalistes islamiques, loin de ce monde idéalisé dont rêvaient les Maliens au sortir des indépendances.