À l’occasion du Festival cinéma du monde de Sherbrooke, Touki Montréal vous présente plusieurs films émouvants, touchants et importants qui ont tapé dans l’œil de la rédaction. C’est le cas du film La parfaite histoire.
Synopsis
Michelle Shephard a parcouru le monde en plus de 20 ans de carrière comme correspondante internationale pour le Toronto Star.
En 2010, lors d’un voyage en Somalie, elle rencontre le jeune Ismael, à Mogadiscio. Dans les colonnes du quotidien torontois, la journaliste canadienne relate alors l’histoire de cet adolescent qui a eu une main et un pied coupés parce qu’il avait refusé de rejoindre les rangs de l’organisation Al-Chabab (plus tard affilié à Al-Qaïda).
L’histoire fait le tour du monde et elle est reprise par les plus grands journaux, dont le prestigieux New York Times. Très vite, la solidarité s’organise dans la diaspora somalienne à Toronto. C’est ainsi que le « projet Ismael » voit alors le jour afin de lui venir en aide. Le jeune réussit à quitter le pays pour la Norvège, dans la ville de Harstad, où il acquiert le statut de réfugié. La parfaite histoire, en somme.
Notre avis
Le film documentaire La parfaite histoire a été tourné près de 10 ans après la première rencontre entre Michelle Shephard et le jeune Ismael. La journaliste le retrouve en Norvège, où il est sur le point de recevoir la nationalité norvégienne. Le jeune homme semble heureux et épanoui dans son nouveau chez-lui. Il poursuit ses études, apprend le norvégien. Il semble s’intégrer parfaitement dans son nouveau pays d’adoption.
La caméra suit la journaliste et Ismael. Le spectateur assiste à leurs retrouvailles à Harstad, une petite ville située à 200 kilomètres au nord du cercle polaire.
On les suit à Toronto, puis lors du retour du jeune homme dans son pays de naissance, la Somalie, après plus de 10 ans d’absence. Une révélation du jeune Somalien à la moitié du tournage du documentaire va totalement bouleverser les plans. L’histoire qu’il avait racontée en 2010 n’était pas réellement authentique.
Ismael a choisi de relater une version de son histoire quelque peu romancée pour s’attirer la sympathie de la journaliste et, par ricochet, de tous ceux qui se sont émus en lisant son histoire.
Et c’est là que se trouve le cœur du sujet du documentaire : qu’est-ce qui avait tant touché Michelle Shephard dans l’histoire d’Ismael ? Le côté manichéen de son récit, avec des gentils d’un côté et des méchants de l’autre ?
Dans son documentaire, Michelle Shephard propose une réflexion intéressante sur les limites de l’objectivité journalistique et des enjeux éthiques qui en découlent.
Ou tracer les limites entre le sujet et le journaliste ? Qu’est-ce qu’une bonne histoire ? Pourquoi choisir de s’intéresser à cette histoire plutôt qu’à une autre ? Comment un correspondant étranger choisit et couvre des histoires, alors qu’il ne vit pas dans le pays et que son accès y est restreint, surtout dans les zones de conflit ?
CITATION EN EXERGUE : « J’ai été inondée de messages de collègues qui me disent ne pouvoir cesser de penser à Ismael et au film. Cela nous oblige à nous questionner sur nos responsabilités comme journalistes. » – Michelle Shephard
Dans un texte publié sur le site de l’ONF, Michelle Shephard écrit ceci : « Ce film à la fin désordonnée nous laisse avec un sentiment d’inconfort. Il pose plus de questions qu’il n’apporte de réponses. Et c’est en partie l’intention sous-jacente. Car c’est un film qui, nous l’espérons, suscitera un débat et d’autres discussions. »
Et c’est bien le cas. Dans son documentaire, Michelle Shephard n’apporte pas de réponse, mais ses questionnements sont importants et nécessaires.
Notre note : 7 / 10
La parfaite histoire (2021), Michelle Shephard
Durée : 1 h 13 min
Le film est disponible en intégralité sur le site de l’Office national du film du Canada (ONF) : https://www.onf.ca/film/parfaite-histoire-la/
La parfaite histoire, Michelle Shephard, offert par l’Office national du film du Canada