RD Congo : une justice pour les enfants

 A Goma, le Tribunal pour enfants, installés depuis six mois, traite désormais rapidement les dossiers des enfants en conflit avec la loi et les jugements sont adaptés à leur âge. Grâce à des établissements de garde spécialisés, ils se réintègrent aussi plus facilement dans la société.

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Accusé de vol simple, le jeune M. a été amené au Tribunal pour enfants où il a été gardé dans l’Établissement de garde et de rééducation de l’État (EGEE). « Une semaine après il a comparu devant le juge, et la semaine suivante est intervenue la mesure du juge, (l’équivalent du jugement pour les adultes).

Comme il avait reconnu les faits, le juge l’a réprimandé et l’a conseillé, nous l’avons ensuite ramené à la maison », témoigne le frère aîné de ce garçon de 15 ans. « Je suis vraiment content du travail que fait le Tribunal pour enfants, car avant, les enfants passaient des mois, voire des années en prison pour des faits bénins et sans même comparaitre », ajoute-t-il.

Enfants de RDC ; Photo : J McDowell, Flickr

L’installation, en juin 2011, de ce tribunal qui compte deux juges est saluée par tous : « Lorsque les enfants étaient incarcérés dans la prison centrale avec les adultes, ils étaient initiés à des actes de délinquance au point qu’ils quittaient la prison en étant plus délinquants qu’à leur entrée.

En plus de rendre justice, ce tribunal est un instrument de protection des droits des enfants », explique Jimmy Muhima, le chargé de la protection légale et sociale des enfants au sein de l’organisation Children Voice, une organisation de protection des droits de l’enfant.

Protéger les enfants

« Ici, les cas des enfants sont traités avec diligence car nous visons la protection de l’enfant », a expliqué le juge Willy Sumaili Kanyongolo, président de ce tribunal. « Lorsqu’un enfant nous arrive, en provenance de la police surtout, nous commençons par l’enrôler au registre des enfants en conflit avec la loi, précise-t-il. Ensuite nous établissons le billet d’hébergement en attendant la mesure provisoire des juges. » Le juge prononce la mesure deux semaines plus tard si les faits sont clairs. Lorsque des enquêtes sont nécessaires, comme pour les viols, c’est un peu plus long.

Selon les statistiques fournies par les juges, la plupart des enfants sont poursuivis pour viol. « Il ne s’agit pas nécessairement de relations forcées, note Jimmy Muhima. Mais comme les filles concernées sont mineures, les jeunes garçons sont traduits en justice pour décourager ces pratiques. » Les autres délits sont surtout des vols. Les uns purgent leur peine à l’EGEE, d’autres dans des institutions privées à caractère social comme le Mouvement international des droits de l’enfant, de la femme, de l’homme veuf et de leur promotion sociale (Midefehops).

D’autres options sont prévues par la loi No 09/001 du 10 janvier 2009 portant protection de l’enfant qui a instauré les tribunaux pour enfants qui commencent juste à être installés dans le pays. Il s’agit des établissements de rééducation de l’État (EREE) pas encore mis en place à Goma. Les enfants en conflit avec leurs familles, peuvent aussi être gardés dans des familles d’accueil, ce qui ne se fait pas encore à Goma.

Fonctionnement précaire

Actuellement l’EGEE héberge environ 30 enfants. « Nous ne gardons pas tous les enfants dont les dossiers sont en cours, explique le responsable de cette institution. Pour certains enfants les juges estiment qu’ils peuvent rester dans leurs familles, et venir seulement les jours de l’audience. D’autres sont assignés à résidence. » Pour les enfants, on ne parle pas ni de condamnations ni de peine, mais de décisions de juges. Cela va de la simple réprimande au placement de l’enfant à l’EGEE jusqu’à sa majorité ou sa 22e année.

Les parents ont compris le rôle du travail de rééducation qui est fait grâce à ce tribunal indique D. Kasoki, assistante sociale qui y est affectée. Certains parents commencent à les amener d’eux-mêmes. « J’ai déjà enregistré trois cas des jeunes qui s’adonnent à la drogue et qui ont été amenés par leurs parents », précise le juge. On les initie ainsi aux travaux manuels.

C’est grâce au financement de l’Unicef qui prend en charge « les frais de justice pour les enfants en conflit avec la loi, la ration des enfants gardés à l’EGEE ainsi que les frais de fonctionnement du tribunal, que celui-ci peut fonctionner. Mais le juge Willy Sumaili est inquiet : « Les autres agents judiciaires comme les greffiers, les huissiers, les assistants sociaux qui sont des nouvelles unités dans l’administration publique du pays ne sont pas pris en charge par le gouvernement. Et comme ce financement touche à sa fin, le fonctionnement de ce tribunal n’est pas garanti à partir du mois de janvier 2012. »

Par Alain Wandimoyi

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