Après dix jours de projections filmiques riches en thèmes et en émotions, le Festival du Film Black de Montréal refermait ses portes en bonne et due forme le dimanche 2 octobre. C’est au Cinéma Impérial que la soirée de clôture a eu lieu en compagnie de Gabriel Range, réalisateur britannique du film I am slave et grand vainqueur de la soirée avec le Prix du meilleur long métrage.
Comme dans tous grands festivals, la distribution des prix a précédé l’ultime projection composée du court-métrage Habibti et du très attendu I am slave.
Pour ce qui est de la catégorie des meilleur moyen-métrage documentaire, Kamenge, Northerns Quarters a séduit le jury composé d’Anne-Marie Dupras, Steve Bastien et Will Prosper. Damien Faure, réalisateur de La colonisation oubliée repart avec le Prix du meilleur court-métrage documentaire.
Sule and the case of the tiny sparks se voit décerner le Prix du meilleur court-métrage animation tandis que C.R Reisser remporte celui du meilleur court-métrage fiction avec Protect the nation. À plusieurs reprises, Anne-Marie Dupras confesse la difficulté que son jury a rencontrée pour aboutir à des choix finaux. De ce fait, une mention spéciale a été attribuée à Habibti de Nour Wazzi.
Une mention spéciale en plus est décernée au documentaire d’Eric Strauss et Daniele Anastasion, le très cocasse The redemption of General Butt Naked.
Enfin, avec Don Jordan et Danielle Leduc, I am slave se voit désigner meilleur long-métrage de fiction. Venu spécialement d’Angleterre, Gabriel Range est monté sur scène pour récupérer son prix et remercier le jury ainsi que le public.
La réalisatrice danoise Vibeke Muasya a elle aussi fait le voyage outre-Atlantique et se voit offrir une mention spéciale pour son film Lost in Africa. Enfin, Case Départ de Thomas Ngijol et Fabrice Éboué ne repart pas bredouille puisque la comédie se voit elle aussi gratifiée d’une mention spéciale.
I am slave
Malia Alnour, jouée par la talentueuse Wunmi Mosaku, est faite esclave à l’âge de douze ans après une attaque nocturne d’une milice arabe dans son village. Après plusieurs années à Khartoum, où elle subit plusieurs sévices physiques de la part de ses maîtres, elle est forcée de quitter le Soudan pour l’Angleterre où une nouvelle famille l’attend.
Son père, Bah Alnour, ne perd pas espoir et continue, six ans après l’enlèvement de sa fille à la rechercher.
Inspiré de l’histoire vraie de Mende Nazer, le film de Gabriel Range n’a pas déçu, et ce malgré les espérances pressantes construites jour après jour à chaque rediffusion de la bande-annonce.
Même si quelques images violentes parsèment le film, Gabriel Range a intelligemment déployé ses cartes en mettant l’accent implicitement sur l’oppression pathologique de l’enfermement, l’angoisse perpétuelle et l’irrépressible envie de vivre et d’être libre par n’importe quel moyen et à n’importe quel prix. Le public étouffe avec Malia Alnour et une véritable empathie se crée autour de la situation de la jeune soudanaise.
Lorsque le générique de fin apparait sur l’immense écran du Cinéma Impérial, Fabienne Colas invite Gabriel Range à rejoindre la scène et à apprécier comme il se doit l’ovation faite à son attention par le public dont l’oeil est encore humide.
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Le temps des questions-réponses qui aura duré un peu plus d’une demi-heure permet d’éclairer les intentions du réalisateur et la condition actuelle des quelque 5000 esclaves encore présents en Angleterre (avancées du gouvernement, actions des organismes, etc.). Gabriel Range n’a pas peur des mots en confiant avoir eu des problèmes de financement avec un sujet sensible mettant le doigt sur un tabou britannique.
Le tête-à-tête s’achève par le remerciement chaleureux d’un spectateur : «Je souhaitais vous remercier pour ce film, mais surtout, je tenais à vous féliciter de mettre votre talent, vos compétences cinématographiques et votre expertise au service de causes comme celle-ci et d’offrir au monde un moyen de se questionner et de faire bouger les choses. Vous, réalisateurs comme nous, journalistes, écrivains et autres intellectuels, nous devons être des porte-paroles et nous devons faire en sorte que nos voix s’exportent dans le coeur de tous au-delà des frontières ».
Quelques photos du Festival :
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